Par Jonathan Léger Raymond
Distinct de la banane plantain, les plantains majeur (Plantago major) et lancéolé (Plantago lanceolata), de la famille des Plantaginacées, occupent une place très importante dans la pharmacopée traditionnelle occidentale, bien qu’ils conservent un profil relativement bas à notre époque. Tout comme l’ortie, le plantain s’est naturalisé peu à peu en Amérique, venu d’Europe avec les colons.
Là où le blanc posait le pied, les Amérindiens retrouvaient toujours le plantain qui s’est ainsi mérité le surnom de « pied blanc ».
L’omniprésence du plantain en Eurasie tempérée, en Amérique du Nord et ailleurs dans le monde en font un allié toujours présent mais oublié. Que nous apporte cette petite plante que l’on foule du pied chaque jour sans réaliser sa nature et son potentiel ?
Ses vertus sont pourtant loin d’être ignorées des générations précédentes qui en ont fait très bon usage. En médecine traditionnelle chinoise, le plantain contribue aux convalescences alors qu’au temps de Pline l’Ancien, on l’utilise dans les protocoles de traitement d’au moins 24 maladies.
Les plantes ont mille points de contact avec l’homme, s’offrant à lui, l’entourant de leur multitude pour servir ses besoins, charmer ses yeux et peupler ses pensées ; elles ont en un mot une immense valeur humaine.
— Frère Marie-Victorin (1885-1944)
Plante de premiers soins
Le plantain est un vulnéraire hors pair, c’est-à-dire qu’il aide à refermer une blessure et à ce qu’elle cicatrise proprement par la suite. Il forme une pellicule qui protège la chair vulnérable contre les chocs et les bactéries, tout en créant un effet tenseur qui rapproche les deux côtés de la lésion.
En cas de blessure ouverte, de piqûre ou d’inflammation, on se précipite sur les feuilles de cette plante que l’on mastique jusqu’à former une pâte. On étend celle-ci sur la lésion ou l’inflammation en guise de premiers soins, pour diminuer les saignements, aseptiser la plaie et faciliter la guérison.
La salive elle-même contribue chimiquement aux effets du plantain, bien que l’on puisse tout de même malaxer les feuilles avec un peu de liquide pour former une pâte d’une texture facile à appliquer en cataplasmes.
Laissez la pâte de plantain agir 10-20 minutes, puis remplacer la au besoin par une nouvelle couche. Répétez l’opération plus souvent en fonction de la gravité du problème.
Dans une situation d’urgence où l’on applique du plantain sur une blessure ouverte, même si un peu de terre venait à se retrouver sur la blessure parmi la pâte de plantain mastiqué, il n’y a aucun risque d’infection car toutes les bactéries seront neutralisées par les effets émollient (fibres solubles et collantes), astringent (pellicule de tannins) et antimicrobien de la plante médicinale.
Le jus de la feuille de plantain mastiquée pourra même extirper la plupart des échardes, en séchant et à force d’applications répétitives et de persévérance. De la même façon, le plantain aide à extirper le poison des blessures et il entre aussi dans la fabrication des onguents pour soigner les blessures avec venin.
Effet anti-inflammatoire
Le plantain procure aussi un effet anti-inflammatoire à la peau et aux muqueuses avec lesquels il entre en contact. Cet effet est entre autres attribué aux mucilages qu’il contient qui se gorgent d’eau, formant un liquide épais et gluant qui recouvre la peau et les muqueuses pour les hydrater, les rafraîchir et les protéger.
On peut utiliser la pâte fraîche de plantain mentionnée ci-haut pour soulager les symptômes inflammatoires de l’acné, des furoncles, de l’eczéma et du psoriasis tout en hydratant quelque peu la peau sèche.
Une infusion des feuilles de plantain, tiédie, peut servir en bain oculaire pour soulager l’inflammation présente lors des conjonctivites et des blépharites (inflammation de la paupière).
Bues régulièrement, les tisanes de plantain soulagent l’inflammation au niveau pulmonaire lors des toux sèches et douloureuses, au niveau intestinal, pour le côlon irritable par exemple, et urinaire, en cas d’infection ou autres sources d’inflammation.
En tisane : 1 à 2 c. à thé de feuilles séchées suffisent par tasse d’eau chaude. On les infuse une dizaine de minutes. À boire 2 à 4 fois par jour pendant quelques jours pour en constater les effets.
Richesse nutritive
Lors de leurs jeûnes prolongés, les ermites de l’Himalaya consomment quelques feuilles de plantain par jour pour recevoir un minimum de minéraux et d’oligo-éléments et préserver les réserves de leur corps.
Le plantain est en effet très riche en minéraux, sauf que les feuilles sont très amères et coriaces à manger et qu’elles ne se laissent pas digérer facilement non plus. Mieux vaut les ciseler finement et les ajouter aux salades, les sécher délicatement et les faire infuser en tisane par la suite ou alors les transformer en divers produits pour la peau comme des huiles et des onguents.
Allié digestif
Le plantain se révélera utile pour les problèmes impliquant la présence d’acidité et/ou d’inflammation dans le tractus digestif, pour apaiser la muqueuse digestive, résorber la diarrhée et soulager les hémorroïdes.
On infuse alors quotidiennement ses feuilles séchées pour en boire l’infusion ( meilleure avec un peu de menthe fraîche ou séchée) ou alors on se procure un sirop à base de plantain, deux produits traditionnels qui demeurent sur le marché depuis des siècles dans la plupart des pays occidentaux.
L’assiduité est importante, il faut répéter deux à quatre fois par jour pendant quelques semaines, bien que l’effet adoucissant se fasse sentir plus rapidement.
Ces remèdes sont consommés préférablement à jeun, pour que le plantain rencontre plus facilement la muqueuse digestive et lui procure ses effets, quelques minutes avant les repas par exemple. Ce n’est pourtant pas une règle stricte, parfois les plus sensibles préfèrent le consommer pendant ou après les repas.
Références
Fortin, Daniel et Lacoursière, Estelle. L’herbier médicinal – album d’ethnobotanique québécoise, Québec Science, 1983.
Green, James. The Herbal Medicine-Maker’s Handbook – A Home Manual, Crossing Press, 2000.